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LA VENGEANCE EST UN PLAT QUE DOGMAN MANGE FROID

Père à mi-temps et amoureux des chiens, Marcello (prix d’interprétation masculine 2018 à Cannes pour Marcello Fonte) arrondit ses fins de mois grâce au trafic de drogue.

Après Gomorra (2008) et Tale of Tales (2015), Matteo Garrone nous livre le long-métrage Dogman sur les représailles réalisé d’une main de maître et produit par Archimede.

Une fleur parmi les ruines

 

Dans une petite bourgade du sud de l’Italie, les néons rouges « Dogman, acconciatore per cane » réfléchissent dans une flaque d’eau de pluie récemment formée. Marcè ferme son rideau de fer, livre un pochon de cocaïne et rentre chez lui, toujours accompagné de ses chiens.

Alors qu’il mène cette existence certes périlleuse mais relativement tranquille, Simoncino, un géant blond aussi violent qu’accro à la poudre vient lui trainer dans les pattes. Il veut toujours plus de coke et n’hésite pas à taper et sur Marcello, et dans son stock. Le toiletteur, frêle, généreux et délicat se laisse faire, moins par choix que par dépit. Alors, il en vient même à dépasser certaines limites.

 

 

Marcello Fonte, l’acteur principal du film, déclare à Cannes : « Mon personnage est comme une fleur qui pousse dans la boue et qui reste toujours blanche… ou grise. Il survit, il s’est créé des petites certitudes, des zones de sécurité. »

 

Une violence omniprésente

 

Si le film témoigne d’une grande violence, il est néanmoins difficile de savoir si elle est plus physique que psychologique. Curieux parallèle à établir entre l’ablation d’oreilles dans Reservoir Dogs et ce dogman là qui, lui aussi, a plus d’une fois failli devenir sourd. Remarque, Marcè n’en aurait presque pas besoin, de ses oreilles. C’est dans l’eau ou avec les chiens qu’il se sent le mieux : là où les sons ne sont qu’images, là où le vacarme n’est rien.

Parce qu’avec les humains, Marcè ahane. La loyauté, la reconnaissance sociale et même la drague : rien de tout ça n’est fait pour lui. Les chiens (ses « amore »), eux au moins, sont loyaux et lui offrent la reconnaissance qu’il lui faut. 

Triste visage d’un contexte politique

 

Le film sort en 2018, à l’heure où la Ligue du Nord de Matteo Salvini et le Mouvement 5 étoiles sont les deux partis vainqueurs des élections legislatives italiennes. Bien qu’inspiré par un fait-divers criminel dans les années 80 à Rome, Dogman est un reflet du climat politique transalpin. Alors que la montée des extrêmes s’opère à vitesse grand V en Europe, Dogman retranscrit ce climat de crainte en mettant le spectateur en tension durant 102 minutes.

 

Pour Matteo Garrone, « La peur est au coeur de cette histoire. La relation avec la violence, comment gérer ce rapport : la peur et le désir d’être apprécié de tous, aussi bien de Simoncino que des autres personnages du quartier. Il se trouve donc en conflit par faiblesse. L’histoire de ce personnage s’articule autour du thème de la peur. »

Une peur qui, bien que fidèlement retranscrite à l’écran, est loin de n’être qu’imagée. 

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